{Restaurant} L’Air du Temps
Mon cher frère et sont amie m’ont fait un très très beau cadeau pour mon récent passage à la dizaine supérieure: une visite gastronomique à l’Air du Temps, le restaurant doublement étoilé de Sang-Hoon Degeimbre… dont je rêvais depuis longtemps de découvrir la cuisine.
L’Air du Temps se trouve à Noville-sur-Mehaigne, à une quarantaine de minutes de Bruxelles. La façade sobre de la maison qui l’abrite ne laisse que très peu présager des merveilles qui sont concoctées dans ces cuisines.
L’intérieur est clair, minimaliste, avec une salle en demi-cercle bordée d’une baie vitrée donnant sur une petite cour et de l’autre une grande vitre laissant apercevoir l’activité de la cuisine.
Nous avons été accueillis par un personnel de salle stylé, attentionné et extrêmement sympatique, avec un petit verre d’eau de fleur de fenouil, surprenant et très rafraichissant. Sur la table trônait une grande tuile de pain au maïs grillé, dans son présentoir en pierre noire.
Trois menus nous sont proposés: un menu ‘lunch’; le menu “Genèse” qui, outre les mise-en-bouches et bouchées, offre quatre services; et le menu “Saveurs et Modernité” qui propose 7 services. On n’a pas tous les jours vingt ans, nous opterons pour ce dernier!
Et nous n’avons pas été déçus!
Nous avons eu droit à une succession de plats - 22 pièces d’après mon frangin, moi j’ai arrêté de compter! - plus originaux et mieux travaillés les uns que les autres. Des assiettes (ou verrines) superbes, colorées, rehaussées d’herbes et fleurs fraiches, où chaque élément a été travaillé individuellement pour s’intégrer dans des compositions parfaitement équilibrées.
Contraste des matières entre le coquillage et les céréales soufflées; harmonie des goûts surprenante entre une mousse de foie gras et des cubes d’anguille fumée; surprise lorsqu’il est question de déguster un terreau d’olives et de pain grillé; déclinaisons sur un un produit quand le porc, le chou ou la betterave nous sont présentés déclinés de quatre façons, quatre cuissons, quatre structure et au final quatre saveurs étonnement différentes. Un régal pour les papilles, et pour les yeux aussi, tant la composition de chaque assiette nous émerveille…
J’avais entendu parler de Sang-Hoon Degeimbre comme d’un apôtre de la cuisine moléculaire, et je m’attendais à une démonstration fumante et espumante… Nous avons plutôt été conquis par des plats dans lesquels les techniques moléculaires sont mises au service de la créativité du cuisinier et s’effacent, presque invisible, pour aider à donner corps et structure aux concentrés de saveurs qui composent ces plats.
Notre dégustation a commencé par une petite salade de Coques et palourdes tièdes, accompagnées d’un léger bouillon iodé et de céréales soufflées et grillées.
Ensuite, des Grissins enroulés d’une feuille de sésame imprégnée et pickles de rose.
Puis une Crème figée / Poire / Jus d’herbes aromatiques, surmontés d’une amande fraiche.
Navet tendre / Ruban / Terreau d’olives: une étonnante composition potagère, où les navets déclinés en pickles et en fine tranches aromatisées d’herbes fraiches sont présentés dans un terreau d’olives noires et de pain grillé.
Après cet assortiment de ‘snacking’, nous avons dégusté une première bouchée de Mousse de foie gras / Anguille fumée / Pomme à l’anis / Lait de poule au sésame et miel. Un pur délice. La mousse de foie gras est onctueuse à souhait, douce et absolument pas écœurante; l’association avec le lait de poule (un bouillon de volaille réduit et allongé de lait), la fraicheur de la pomme et la saveur fumée de l’anguille est juste parfaite!
L’Oeuf coque / Sabayon au madère et sirop d’érable / Réduction de ponzu nous a également conquis, certainement une de nos réalisations préférée de ce menu. On découvre les couches successives en plongeant le ‘petit soldat’ grillé dans cet œuf coque original, où le jaune d’œuf se marie avec un sabayon crémeux et les saveurs sucrées du sirop d’érable, relevés par la légère acidité de la réduction de ponzu (un vinaigre japonais à la sauce soja et citron yuzu).
Après ces mise-en-bouches, la dégustation dégustation proprement dite se composait de sept plats:
Courge et Iode: Trois huitres perle blanches imprégnées au champagne, surmontées de lard de colonata relevé par une goutte de piment coréen, le tout présenté sur une mousseline de bleu de hubbard (une courge) et agrémenté d’une rapée minute de citron Kafir. Cette fois encore le mariage des saveurs est subtil et parfaitement maitrisé.
Ensuite, Chou Chou Noix, une déclinaison de cinq choux (de Milan, rave, chinois, frisé, et en kimchi), accompagnés de sardines acidulées, de noix fraiche, d’oeufs de saumon et de poisson volant au wasabi, ainsi que d’une jolie écume de beurre noisette. Un plat très graphique en plus d’être succulent.
Wine Pairing est un émincé de homard breton accompagné d’une confiture de rose, de meringue mousseuse à la réglisse, de salicornes et d’oignon ‘brûlé’, agrémenté au dernier moment d’un jus fumé à la vanille…
Terre Nourricière est une déclinaison sur la betterave - jaune, rouge et Chioggia - chacune subissant une cuisson différente et accompagnées de chips de peau de volaille, de délicates meringues, d’émincé de volaille et d’un jus de betterave fumée et framboise.
Nous terminons cette dégustation salée par un Petit Cochon: quatre cuissons de porcelet accompagnées d’une gelée de céleri, de céréales soufflées, de tomates-cerises ‘surprise’, et d’un jus au gingembre.
Le menu “Saveurs et modernité” se termine bien entendu sur une note sucrée avec deux douceurs très complémentaires, la fraicheur du dessert aux pommes succèdent à la force du chocolat.
Cacao est une soupe de chocolat Manjari (Valrhona 64%), accompagnée d’une glace aux dattes presque tiède, onctueuse, d’une mini-boule de Berlin et ‘mouchoir’ de cacao amer.
Pour terminer, Crêpe Normande est une variation sur la pomme accompagnée de petites crêpes, d’un sorbet de pommes caramélisées, de dentelles à la cannelle, et de boutons de beurre à la pomme verte. Un dessert rafraichissant et encore une fois une subtile déclinaison d’un produit de saison, parfaite conclusion de ce repas.
Si j’en suis resté là de mes photos, la dégustation ne s’est elle pas terminée si tôt… Outre les mignardises qui accompagnaient notre café, nous avons encore dégusté une sucette aérienne, un fragile mini-cône glacé de pâte au yahourt, mousse au yahourt et sorbet intense aux fruits rouges, ainsi qu’une démonstration de cuisine moléculaire pure: une mousse au chocolat et arachides plongée dans l’azote liquide fumant sous nos yeux et rappelant un snickers glacé et fumant!
Nous terminons ce repas émerveillés, charmés par tant de saveurs nouvelles et inattendues…. avec déjà l’envie d’y revenir très vite!